Cheikh al islâm fut questionné au sujet de celui des fils du khalîl d’Allâh Ibrâhîm عليه السلام qui était voué au sacrifice : s’agit-il d’Ismâ’îl ou de Ishâq ?
Il répondit :
Louange à Allâh, Seigneur des mondes. Il y a sur cette question deux avis connus des savants, et chacun fut rapporté par un groupe des salafs.
Aboû Ya’lâ rapporta sur cela deux rapports de Ahmed soutenant qu’il (le voué au sacrifice) s’agit d’Ishâq, suivant en cela Abou Bakr Ibn ‘Abdil’Azîz, ce dernier ayant suivi lui-même Mohamed Ibn Jarîr (Abou Ja’far at Tabari). C’est de ce fait qu’Abou al Faraj Ibn al Jawzi rapporte que les partenaires d’Ahmed soutiennent qu’il s’agit de Ishâq alors qu’en réalité seuls les deux (c.-à-d. Abou Bakr et Ibn Jarir) soutiennent cet avis ainsi que ceux qui les suivent. Il relate ce même avis de Mâlik lui-même cependant un groupe de ses partenaires (malikites) le contredit sur cela.
Ach Charîf Abou ‘Ali ibn Abi Yoûsouf rapporte que l’avis authentique du madhhab de Ahmed sur cette question est qu’il s’agit d’Ismâ’îl, et d’ailleurs son propre fils Abdoullâh Ibn Ahmed rapporte cela de son père. Il dit “l’avis de mon père est qu’il s’agit d’Ismâ’îl”.
Dans l’ensemble cette divergence est connue, néanmoins l’avis pour lequel il est obligatoire de trancher est qu’il s’agit d’Ismâ’il. C’est cela que prouvent le Livre et la Sounnah et les preuves sont connues.
C’est ce même avis que confirme la Torâh qui est actuellement entre les mains des gens du Livre, car il y est écrit qu’Il a dit “égorge ton fils unique”. Et dans une autre traduction il y a écrit ton ainé (ou premier né), et c’est Ismâ’îl qui était justement son fils unique (à ce moment-là) et son ainé (par la suite), et cela selon le consensus des mouslims ainsi que des gens du Livre. Cependant les gens du Livre ont falsifié cela et ont rajouté Ishâq. De là certains ont appris cela d’eux, chose qui finit par se propager chez certains mouslims, qu’il s’agit d’Ishâq. L’origine de cette information provient de la falsification des gens du Livre. Parmi ce qui prouve qu’il s’agit d’Ismâ’îl il y a l’histoire de l’immolé (adh dhabîh) citée dans sourate as Sâfâte (les rangs). Allâh dit :
Nous lui fîmes alors la bonne annonce d’un garçon longanime. (as Sâfâte v101)
Cette bonne annonce renferme trois éléments :
Qu’il s’agit d’un garçon.
Qu’il atteindra la maturité (ou puberté) et qu’il sera endurant face à l’épreuve (longanime), et quelle endurance plus immense que de dire à son père, lorsque ce dernier lui expose de l’égorger :
Tu me trouveras certes, si Allâh le veut, du nombre des endurants (as Sâfâte v102)
Il a été dit : Allâh n’a décrit aucun des prophètes par un degré moindre que la longanimité pour la fierté qu’elle implique par sa présence. Ibrâhîm fut qualifié de la sorte dans La Parole d’Allâh :
Certes Ibrâhîm était plein de sollicitude et longanime (at Tawbah v114)
Ibrâhîm était certes longanime, très implorant et repentant. (Hoûd v75)
L’événement témoignant de sa longanimité
Puis quand tous deux se soumirent (à l’ordre) et qu’il l’eut couché sur le front, nous l’appelâmes : Ô Ibrâhîm ! Tu as confirmé le rêve. C’est de la sorte que Nous rétribuons en bien les bienfaisants. Telle était certes l’épreuve manifeste. Et nous le compensâmes par un grand sacrifice. Et nous le firent perpétuer dans la postérité. Paix à Ibrâhîm. Ainsi récompensons-nous les bienfaisants. Il est certes de Nos serviteurs croyants. Nous lui fîmes la bonne annonce d’Ishâq comme prophète d’entre les gens pieux. Et nous le bénîmes ainsi que Ishâq. Et parmi leur descendance il y a le bienfaisant et l’injuste envers lui-même de façon manifeste. (as Sâfâte v103 à 113)
Cette histoire prouve qu’il s’agit d’Ismâ’îl sous plusieurs angles.
Premièrement : Il lui a annoncé l’immolé et cita son histoire en premier, et lorsqu’il remplit son engagement (envers son Seigneur) Il dit :
Nous lui fîmes la bonne annonce d’Ishâq comme prophète faisant partie des gens pieux. Et nous le bénîmes ainsi que Ishâq. Et parmi leur descendance il y a le bienfaisant et l’injuste envers lui-même de façon manifeste. (as Sâfâte v112-113)
Il clarifia qu’il s’agit de deux bonnes annonces, celle du voué à être immolé puis la deuxième, celle de Ishâq. C’est flagrant.
Deuxièmement : Il n’évoqua l’histoire de l’immolé qu’à cet endroit du Livre tandis qu’à tous les autres endroits il ne cite que l’annonce de Ishâq en particulier. Comme dans la sourate de Hoûd :
Son épouse était debout et elle rit, alors Nous lui fîmes la bonne nouvelle de Ishâq, et après Ishâq Ya’qoûb. (Hoûd 71)
Si Ishâq avait été le voué au sacrifice, cela aurait été une enfreinte à la promesse de la venue de Ya’qoûb. Allâh dit :
Il ressentit alors de la peur vis-à-vis d’eux. Ils dirent n’aie pas peur, nous te faisons la bonne annonce d’un garçon savant. Alors sa femme s’avança, se frappa le visage et dit “une vielle femme stérile”… (adh Dhâriate v 28-29)
Et Allâh dit sans la sourate al hijr
Il dit : M’annoncez-vous (cette nouvelle) alors que la vieillesse m’a atteint ? Que m’annoncez-vous donc ? Ils dirent : Nous t’annonçons la vérité; ne sois donc pas de ceux qui désespèrent. (al Hijr 53-55)
Sans pour autant citer qu’il était l’immolé. Puis Il cita les deux bonnes annonces ensemble : celle de l’immolé et celle de Ishâq après lui. Cela faisait partie des preuves que Ishâq n’est pas l’immolé. Cela est appuyé par le fait qu’Il a cité qu’Il fit don de lui ainsi que de Ya’qoûb à Ibrâhîm dans Sa Parole :
Et Nous lui donnâmes Ishâq et de surcroit Ya’qoûb, et de tous Nous fîmes des gens pieux. (al Anbiya v72)
Et Sa Parole :
Nous lui donnâmes Ishâq et Ya’qoûb, et plaçâmes dans sa descendance la prophétie et le Livre. Nous lui accordâmes sa récompense ici-bas tandis que dans l’au-delà, il sera parmi les gens de bien. (al ‘Ankabout v27)
Et Allâh ne cita pas l’immolé.
Troisièmement : Il précisa que l’immolé était un jeune homme longanime alors que lorsqu’il fit l’annonce de Ishâq il cita l’annonce d’un jeune garçon savant, dans une autre partie du Qorâne, et cette précision a forcément été émise pour une raison lucide. Chose qui renforce le lien entre les deux descriptions, vu que la longanimité va de pair avec l’endurance, elle-même étant une marque distinctive du voué à l’immolation, et Ismâ’îl fut justement décrit comme endurant dans Sa Parole :
Et Ismâ’îl, Idrîs et Dhoul Kifl, tous étaient des endurants. (al Anbiya v85)
C’est également un troisième point de vue car Il a dit à propos de l’immolé :
Il dit : Ô Mon cher père, fais ce qui t’a été ordonné. Tu me trouveras, si Allâh veut, du nombre des endurants. (as Sâfâte v102)
Allâh qualifia déjà Ismâ’îl comme faisant partie des endurants tout comme il le décrivit comme étant de ceux qui tiennent leur engagement dans Sa Parole :
Il était fidèle à ses engagements et était un messager et prophète. (Maryam v54)
Car il s’est engagé auprès de son père à endurer à se laisser égorger, chose qu’il respecta.
Quatrièmement : l’annonce de la naissance de Ishâq était un miracle car la personne âgée ne peut enfanter. C’est pour cela que le Khalîl (Ibrâhîm) a dit :
Que m’annoncez-vous donc alors que la vieillesse m’a atteint ? (al Hijr v54)
Et son épouse dit :
Elle dit : Malheur à moi ! Vais-je enfanter alors que je suis vielle et que mon mari, que voici, est un vieillard ? C’est vraiment là une chose étrange ! (Hoûd v72)
On vient de citer que l’annonce de la naissance d’Ishâq eut lieu alors qu’Ibrâhîm était âgé et qu’elle se déroula communément entre lui et son épouse. Quant à l’annonce de l’immolé, elle n’eut lieu que pour Ibrâhîm et il fut éprouvé seul par l’égorgement, sans la mère à qui l’annonce fut faite. Cela s’accorde avec ce qui a été rapporté du prophète ﷺ et de ses compagnons dans le recueil authentique (d’al Boukhari) et autre, que lorsque Hâjar enfanta Ismâ’îl, Sârah fut prise de jalousie. De là Ibrâhîm se rendit avec Ismâ’îl et sa mère à Mekkah et c’est là-bas qu’il lui fut ordonné d’égorger Ismâ’îl, et cela appuie que l’immolé n’est pas Ishâq.
Toujours parmi les preuves, il y a qu’Allâh a dit :
Nous lui fîmes alors l’annonce de Ishâq et après Ishâq, de Ya’qoûb. (Hoûd 71)
Comment après cela peut-il lui être ordonné de l’égorger ? L’annonce de la venue de Ya’qoûb implique que Ishâq vivra et qu’il l’aura comme fils, et il n’y a aucune divergence sur le fait que l’histoire de l’immolé se déroula avant la naissance de Ya’qoûb. De même que Ya’qoûb n’a vu le jour qu’après la mort d’Ibrâhîm alors que cette histoire se déroula de son vivant sans aucun doute.
Toujours parmi les preuves, il y a que l’histoire de l’immolé se déroula à Mekkah et lorsque le prophète ﷺ la conquit, il y avait deux cornes de bélier dans la Ka’bah, il dit alors au gardien : “Je t’ordonne de recouvrir ces cornes car il ne convient pas qu’une chose distrayant ceux qui font la salât se trouve en direction de la Qiblah”. C’est pour cette raison que Minâ fut décrétée lieu rituel de l’époque d’Ibrâhîm et d’Ismâ’îl عليهما السلام, et le Qorâne dit qu’ils sont tous les deux les fondateurs de la Maison Sacrée. Il n’a été rapporté de personne que Ishâq se rendit à Mekkah, ni des gens du Livre ni de personne d’autre. Par contre certains croyants des gens du Livre[1] prétendent que l’histoire de l’égorgement s’est produite au Châm, et cela n’est que chimère. Car dans le cas contraire, si cela s’était réellement produit sur un de ces monts, il aurait été connu et probablement que ce lieu aurait été désigné pour y accomplir des rites, comme cela fut le cas pour le masjid construit par Ibrâhîm ainsi que ses lieux rituels avoisinants. Il y a sur le sujet d’autres preuves de ce que nous avons cité et certaines questions exposées par certains, à l’instar d’Ibn Jarîr, al Qâdi Abou Ya’lâ et as Souheyli, cependant l’occasion ici ne nous permet pas de les citer ni d’y répondre, et Allâh est plus savant.
Louange à Allâh, Seigneur des mondes.
Éloges et salut d’Allâh à Mohammed et ceux qui le suivent.
Source : مجموع الفتاوى ص 331 ج 4
Traduit par Khalîl du Yémen.
- ↑ Cheikh al Islam considère mécréants les gens du Livre. Il parle donc probablement ici des gens du Livre d’avant la venue de Mohammed ﷺ, qui avaient encore la croyance de ‘Issâ عليه السلام, wallâh a’lam.
Fatwa originale en arabe :